La Banque Centrale Européenne a publié il y a quelques jours les statistiques concernant la composition du bilan actif/passif des banques commerciales de la zone euro pour le mois d'avril. Si l'on considère donc la somme des actifs détenus par les banques commerciales des 17 pays de la zone euro, on arrive à un total vertigineux de 33.900 milliards d'euros. Les banques européennes sont-elles donc "too big to fail" ?
Mais 33.900 milliards, cela représente quoi en fait? Pour cela, comparons donc le total des actifs des banques de chaque pays de la zone euro au PIB de ce pays (source : ECB Aggregated Balance sheet MFI excluding Eurosystem + FMI World Economic Outlook). Par exemple en France, le total des actifs détenus par les banques commerciales (BNP Paribas, Crédit Agricole, Société Générale...) s'élève pour avril 2012 à 8.500 milliards d'euros, soit plus de 4 fois le PIB de la France ! En moyenne, le montant des actifs détenus par les banques de la zone euro est 3,5 fois supérieur au PIB, avec un record pour le Luxembourg (actifs bancaires 25 fois supérieurs au PIB).
Il est toujours un peu délicat de comparer la taille d'un bilan bancaire avec le PIB d'un pays qui représente un flux, mais cela permet de faire une comparaison internationale et d'estimer les effets d'une faillite bancaire sur l'économie d'un pays. Le Captain' n'est pas le seul à calculer cela: le site ZeroHedge.com avait publié en 2010, en utilisant les données de JP Morgan, un graphique présentant le total des actfis de chaque banque (et non pas comme ci-dessus la somme des actifs des banques d'un pays) en pourcentage du PIB. Pour revenir sur la France, les actifs détenus par les banques commerciales représentent donc 412% du PIB, dont, selon les données de JP Morgan en 2010, 101% pour BNP Paribas, 81% pour le Crédit Agricole et 55% pour la Société Générale (source: ZeroHedge).
101% du PIB pour BNP Paribas ! Mais est-ce toujours le cas aujourd'hui ? Oui, rien de nouveau depuis, le montant des actifs de BNP Paribas étant fin 2011 de 1965 milliards d'euros, soit un peu moins de 100% du PIB (source: BNP Paribas - Données clefs).
Selon un article posté sur le Financial Times (Europe and Volckerâ€s rule) et une étude de Goldman Sachs, limiter la taille des banques est une chose très difficile en Europe, où la taille des banques en % du PIB est bien plus importante qu'aux Ãtats-Unis (par exemple, le total des actifs de JP Morgan ne représente que 15% du PIB des Ãtats-Unis). Goldman propose alors trois scénarios possibles: (1) réduire la taille des banques européennes, mais cela pourrait affecter la compétitivité de ces banques au niveau mondial (2) créer un mécanisme européen de sauvetage des banques ou (3) ne toucher à rien pour le moment.
Conclusion: Selon Goldman Sachs: solution 3. C'est à dire que les banques européennes resteront trop grandes pour faire faillite; l'Etat et/ou l'Europe (MES ou autres fonds de stabilité/sauvetage) seront donc dans l'obligation d'aider les banques en cas de difficultés pour éviter des faillites qui seraient ingérables ("Many of Europeâ€s banks will remain too big to fail"). Voilà pourquoi le Captain' vous parlait la semaine dernière de l'impossibilité de garantir réelement les dépôts des français en cas de faillite d'une grande banque commerciale française (lire: La garantie des dépôts de 100.000 euros; comment ça marche?). Le "too big to fail" a encore de beaux jours devant lui.