Chaque année en France, entre 180.000 et 200.000 immigrés arrivent légalement sur le territoire (et environ 100.000 retournent dans leur pays). Cette immigration légale est au coeur du débat actuel. Nicolas Sarkozy a expliqué il y a une dizaine de jours que "nous avons trop d'étrangers sur notre territoire" et que "sur le mandat de cinq ans à venir, [il] considère que pour relancer dans de bonnes conditions l'intégration, il faut diviser par deux le nombre de gens que nous accueillons". Marine Le Pen quant à elle souhaite diviser par 20 l'immigration, en limitant le nombre de nouveaux immigrés à 10.000 par an. Difficile de parler d'immigration sans se faire insulter de raciste ou de démago. Mais bon, le Captain' va tout de même essayer, en vous présentant les chiffres et la réalité de l'immigration en France.
Selon la dernière étude de l'INSEE de 2008, 8,4% des personnes vivant en France sont immigrés, ce qui représente 5,3 millions de personnes. Mais on se va pas se le cacher, lorsque l'on pense "immigrés", on pense en 1er lieu (sans se mentir) aux "immigrés africains". Sur les 5,3 millions d'immigrés, 2,2 millions sont nés dans un pays africains (soit 42,5% du total).
Le débat actuel porte sur les coûts et les apports de l'immigration. Si l'on regarde l'immigration uniquement d'un point de vue économique, ce qui est d'ailleurs assez contestable, la question est donc de savoir si les coûts pour l'Etat de la politique d'immigration (prestations sociales, intégration, maintien de l'ordre...) sont inférieurs ou supérieurs aux apports (main d'oeuvre, consommation, diversité dans l'emploi).
Si vous attendez une réponse claire, le Captain' a le regret de vous annoncer que c'est impossible de mesurer cela précisément. De nombreuses études ont été réalisées sur ce sujet, pour des conclusions très diverses. Une équipe de chercheurs de l'université de Lille a estimé un impact positif de l'immigration sur les finances publiques de 12,4 mds d'euros par an (source ici), tandis qu'une autre étude de "Contribuables associés" estime un impact négatif de 26 mds d'euros par an (source ici). Pourquoi tant de différence? Car la 1ère étude s'intéresse uniquement aux contributions des immigrés (paiement impôts, TVA, CSG...) auxquelles sont retranchées les dépenses (retraites, RSA, alloc', chômage...). La seconde étude est plus large, en prenant en compte par exemple la hausse du budget de la police et de la justice pour faire face à l'immigration, le fait que certains emplois pour lesquels des immigrés payent des impôts auraient pu être occupés par des non-immigrés...
Les chiffres présentés ci-dessus sont calculés pour une seule année, alors qu'il serait de plus préférable d'avoir une vision de long terme des coûts et bénéfices de l'immigration (impact futur sur les retraites, amortissement du coût d'intégration, structure par âge...). Une étude intitulée "L'immigration a t-elle un effet sur les finances publiques" met en avant cette vision de long terme dans le cas de l'Australie, en montrant les bénéfices nets annuels apportés par les immigrés au Australie en fonction du nombre d'années de présence sur le territoire (le total est positif ET croissant avec le temps). Ensuite je vous l'accorde (sans être raciste encore une fois, simple constat), que le type d'immigration n'est pas le même en Australie et en France.
Bref, il est donc très compliqué de calculer la contribution précise de l'immigration sur les finances publiques. Regardons donc la situation dans les autres pays européens. Le nombre d'étrangers ("étranger" est différent "d'immigré" ; un immigré étant défini par son pays de naissance alors qu'un "étranger" est défini par sa nationalité) en pourcentage de la population a été publié par l'INSEE en 2008. Avec 5,1% d'étrangers (= n'ayant pas la nationalité française) sur le territoire, la France est dans la moyenne basse de l'Europe. Difficile donc de dire qu'il y a "trop d'étrangers sur notre territoire".
Mais le problème en France est principalement dû à la difficulté pour les immigrés de s'intégrer et de trouver un emploi. Encore une fois les statistiques parlent, et ce sont principalement les étrangers hors Union Européenne qui sont le plus touchés par le chômage. En 2008, alors que le chômage n'était que de 7% pour les personnes de nationalité française et de 6,5% pour les étrangers ressortissants de l'Union Européenne, le chômage atteignait 19% chez les étrangers hors UE 27 !
Conclusion: C'est un sujet tabou en France et pourtant un enjeu de taille. L'immigration est une force pour un pays, à condition cependant qu'elle soit bien encadrée et que l'intégration des immigrés soit l'une des préoccupations majeures de l'Etat. Nicolas Sarkozy prend souvent l'Allemagne en exemple, mais bizarrement lorsque l'on parle d'immigration, Monsieur Sarkozy ne parle pas de l'Allemagne et de ses 8,7% d'étrangers (enfin il est vrai que la situation n'est pas vraiment la même, l'Allemagne ayant un taux de fécondité très faible comme le Captain' vous l'avait présenté dans son article "L'évolution démographique et la natalité : point fort de la France?"). Mais attention aux amalgames et conclusions simplistes des politiciens sur ce sujet extrêmement complexe.