L'article du Captain sur l'immigration en France ayant eu son petit succès, je profite donc de la publication hier d'un rapport de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) pour vous fournir de plus amples statistiques sur l'immigration en France et en Europe.
Si vous souhaitez commencer par le 1er article sur l'immigration du Captain', c'est par ici "La réalité de l'immigration en France : chiffrage et statistiques". Si vous avez envie de lire le rapport de l'OCDE, c'est par là "OECD Economic Surveys: European Union 2012". Et enfin si vous êtes un flemmard, restez donc sur cette page et passez au paragraphe suivant.
Pourquoi la lecture du rapport de l'OCDE m'a donné envie de continuer sur la thème de l'immigration? Car un chapitre entier, plein de statistiques et recommandations très intéressantes, est consacré à l'immigration et à la mobilité en Europe (page 61 à 83). Et n'en déplaise à Marine, l'OCDE ne conseille pas de renforcer les contrôles et de faire diminuer l'immigration, mais au contraire de réduire les obstacles au sein de l'Union Européenne. Pour résumer, toujours selon l'OCDE, la mobilité au sein de l'Union Européenne devrait en principe permettre une meilleure adéquation de l'offre et de la demande de travail, pour combler les pénuries de travailleurs dans certains domaines et faire face au vieillissement de la population. Mais pour cela, il faut que les réglementations du marché du travail soient améliorées et que les obstacles à la mobilité réduits.
La libre circulation des travailleurs est un droit fondamental dans lâ€Union européenne. Cependant, afin de contrôler les flux migratoires en provenance des pays de l'Est qui sont entrés dans l'Union Européenne en 2004 et 2007, le traité d'adhésion de ces pays autorisait les Etats membres à limiter pendant 7 ans le droit des travailleurs à se rendre librement dans un autre Etat membre pour y travailler. Les travailleurs des 10 pays qui ont rejoint l'Union Européenne en 2004 peuvent désormais circuler librement au sein de l'Union, ce qui n'est pas encore le cas des travailleurs issus des deux pays ayant rejoins l'UE en 2007: la Bulgarie et la Roumanie.
Parmi l'ensemble des pays de l'Union, seulement 9 pays ont toujours à l'heure actuelle des restrictions en ce qui concerne l'immigration des travailleurs roumains et bulgares: l'Autriche, la Belgique, l'Allemagne, la France, le Luxembourg, les Pays-Bas, l'Espagne et l'Angleterre.
Pourquoi est-ce que le Captain' vous parle de cela? Car il est très intéressant de voir qu'un pays a agit à contre courant de la pensée qui consiste à ce dire "en temps de crise, arrêtons l'immigration et le chômage diminuera"! Depuis janvier 2012, l'Italie a en effet ouvert ses frontières aux travailleurs roumains et bulgares, malgré un taux de chômage d'environ 28% chez les jeunes (et de 9% pour l'ensemble de la population). Mario Monti, l'homme qui est peut-être en train de sauver l'Italie, a justifié cela par "la conscience des bons rapports et des bons curriculum vitae des travailleurs roumains et bulgares"! What !! Il est encore trop tôt pour connaître les effets de cette politique d'ouverture de l'économie italienne, mais cela change du raisonnement stupide "immigration = chômage pour les bons français".
Pourtant tout comme en France, les immigrés en Italie sont principalement des travailleurs peu qualifiés (environ 50% des immigrés n'ont pas l'équivalent du bac). Intéressant aussi à noter: malgré un niveau d'éducation des immigrés similaire, le chômage chez les "non-italiens" en Italie (en bleu foncé sur le second graphique) est quasi le même que le chômage des "italiens de souche" (en bleu clair). En France par contre, il y a une très forte différence entre le taux de chômage chez les français et chez les étrangers (du simple au double). Pour terminer cette comparaison France/Italie, environ 5% de la population des deux pays est étrangère, ce qui place les deux pays dans la moyenne basse de l'Union Européenne.
Attention! Le Captain' ne se fait pas le défenseur de la veuve et l'orphelin (et du roumain!) coûte que coûte! Mais cette étude de la situation italienne montre une toute autre attitude vis à vis de la place des immigrés dans la société. En temps de crise, on pourrait penser qu'il est préférable de diminuer les entrées de travailleurs immigrés, afin de faire diminuer le chômage et relancer la croissance. L'Italie a fait le pari inverse, en enlevant les restrictions aux entrées de travailleurs roumains et bulgares en pleine période de crise! But de la manÅuvre: réduire les blocages sur le marché du travail tout en augmentant les recettes de l'Etat et la consommation (et oui, les immigrés eux aussi consomment, payent des impôts et participent à la croissance).
Conclusion: L'ouverture sans aucune limite ni stratégie de ses frontières à tout type d'immigration est stupide. Mais la fermeture quasi-totale des frontières, sans réflexion sur les bienfaits de l'immigration, l'est d'autant plus (= programme de Marine Le Pen qui prévoir de passer d'environ 200.000 entrées d'immigrés annuelles à 10.000). Il n'est pas encore possible d'analyser les effets de la politique italienne sur l'économie et le chômage, par manque de recul. Peut-être que Mario Monti a totalement tort... Mais si j'avais à parier, je mettrais bien une petite pièce sur Mario plutôt que sur Marine!