Incroyable: ; le prix de l'immobilier parisien n'a pas augmenté entre septembre et octobre 2011 (source: Chambre des notaires de Paris). Il n'a pas baissé non plus, mais c'est la première fois depuis juin 2009 que les prix sont stables mois sur mois. En volume, les ventes de biens immobiliers anciens sont en recul de 12% sur l'année (entre octobre 2010 et octobre 2011). L'immobilier parisien pourrait-il donc enfin chuter et ne plus être considéré comme une valeur refuge?
Vous avez sûrement déjà entendu que "la pierre est une valeur sure". L'immobilier, plus particulièrement l'immobilier parisien, est souvent considéré comme une valeur refuge, c'est à dire le type de bien vers lequel les investisseurs et bons pères de famille se tournent en temps de crise car les risques de baisse sont relativement limités. Mais il y a t-il une vraie raison de distinguer l'immobilier parisien avec l'immobilier en province? Pour cela, le Captain' a utilisé les données de l'INSEE pour comparer les variations de prix en province et à Paris depuis 1995 (variation annuelle en pourcentage ; au dessus de 0 l'immobilier a augmenté sur un an, en dessous il a baissé).
"Captain', sur le graphique je ne retrouve pas la stabilité des prix entre septembre et octobre 2011 dont tu parles en introduction"! Non non il n'y a pas d'erreurs ; il y a certes stabilité des prix entre septembre et octobre 2011, mais si l'on s'intéresse aux variations annuelles, la hausse des prix est à un niveau quasi-historique: +17,9% sur un an. Il est intéressant d'avoir une idée des évolutions mois sur mois, mais il est préférable de regarder les variations annuelles pour corriger l'analyse des tendances saisonnières. Depuis 1995, l'immobilier à Paris s'est apprécié en moyenne de 7% par an et l'immobilier en province de 6%. Avec une inflation moyenne sur la période autour de 2%, il apparaît assez clair que sur cette période, un investissement dans l'immobilier était plus que rentable.
C'est surtout depuis début 2010 que les trajectoires divergent ; l'immobilier parisien s'appréciant à un rythme beaucoup plus soutenu qu'en province. Une explication à cela peut-être qu'autrefois (disons avant 2009), les obligations souveraines étaient considérées comme des actifs sans risque vers lesquels les investisseurs se tournaient en période de crise. Mais avec la crise de la dette, ce n'est plus vraiment le cas, et les investisseurs privilégient aux obligations souveraines des actifs considérés comme valeur refuge, comme l'or ou l'immobilier parisien. Dans l'optique des investisseurs, étant donné l'offre relativement limitée à Paris, les risques de crack sont faibles (en tout cas plus faible qu'en province). Mais comme on peut le voir sur ce graphique ci-dessus, le mythe de "l'immobilier ne baisse jamais" est cependant faux ; entre septembre 2008 (faillite de Lehman Brothers) et septembre 2009, le prix de l'immobilier à Paris et en province ont baissé d'environ 8% sur un an.
Plaçons nous quelques années en arrière, en janvier 2006. Vous êtes à la tête d'une grande banque et vous regardez l'évolution du marché immobilier du pays mystère ci-dessous (VA= variation annuelle, échelle de gauche).
Trop facile mon métier de banquier, l'immobilier augmente en moyenne de 10% tous les ans depuis 10 ans, sans aucune période de baisse. Je peux prêter un peu à n'importe qui, sans trop de garantie, au pire je saisis la maison et je la revends sans aucune perte. Même si avec le recul ce genre de comportement peut paraître stupide, c'est un peu le même type de raisonnement que l'on peut entendre sur l'immobilier parisien "pas de risque, ça ne baissera jamais"! Bon allez, stop le suspense, je pense que vous avez tous découvert notre pays mystère...
Welcome in the USA, bingo (bon ok ce n'était pas très difficile non plus)! Alors que le prix de l'immobilier américain augmentait constamment depuis 10 ans, la chute a atteint une ampleur que personne n'imaginait ; entre avril 2006 et avril 2008, l'immobilier US a baissé de près de 32%. Quelques mois après, en septembre 2008, Lehman Brothers s'écroulait et AIG était nationalisé.
Sans faire de prévision sur l'évolution des prix de l'immobilier en France (ce n'est pas le job du Captain'), les resserrements des conditions de crédit (= les banques prêtent plus difficilement), le rabotage des niches fiscales immobilières et les difficultés économiques prévues en 2012 pourrait ralentir la hausse des prix immo' (voire baisse des prix). Comme démontré aux USA, attention au raisonnement du type "ça n'a jamais baissé donc ça ne baissera jamais" ; ce raisonnement marche parfaitement jusqu'au jour où il ne marche plus.
"Think the unthinkable" devrait être l'une des bonnes résolutions des acteurs économiques et politiques pour 2012 (après le slogan pour 2012 sera sûrement plutôt "Think comment être réélu discretos" mais bon il faut bien espérer...).