Traditionnellement, on distingue deux types de régimes de protection sociale: (1) le système bismarckien, réservé aux travailleurs et à leur famille, financé par des cotisations sociales et (2) le système beveridgien, généralisé à toute la population et financé par l'impôt. Fondée sur un modèle bismarckien à la fin du XIXème siècle, la protection sociale en France fonctionnait jusqu'en 1945 sur le principe du "pas de travail = pas de cotisation sociale versée = pas de protection sociale".
Mais au lendemain de la seconde guerre mondiale, la Sécurité Sociale est créée en France, avec comme but de généraliser progressivement la protection sociale à l'ensemble des résidents. Cette petite introduction historique explique en partie le système de financement actuel de la protection sociale en France, se rapprochant d'un système bismarckien, car financé en majeur partie par les cotisations sociales, mais avec une part beveridgienne grandissante, financée par l'impôt.
En 2010, sur un total de recettes publiques de 957 mds d'euros, dont 855 mds d'euros provenant des impôts et cotisations sociales, 51,2% des recettes ont été affectées à l'administration de sécurité sociale. C'est à dire, pour simplifier, qu'à chaque fois que deux euros d'impôts ou de cotisations sont perçus (TVA, impôt sur le revenu, cotisations sociales, taxe sur le tabac ou le pétrole, CSG...), environ 1 euro sert à financer la protection sociale!
Alors qu'en 1980, 97,9% des recettes des administrations de sécurité sociale provenaient des cotisations sociales, l'instauration de la CSG en novembre 1990 sous le gouvernement Rocard a radicalement changé la donne. Les cotisations sociales ne représentent en effet maintenant plus que 69,6% du financement de la sécurité sociale. Pour rappel, la CSG est un impôt destiné à participer au financement de la protection sociale, prélevé à la source sur la plupart des revenus (salaires, primes, rentes viagères, plus-values, revenus du jeu..). La CSG, un impôt à "assiette large - taux bas", est la 2ème source de recettes fiscales en France, derrière la TVA mais devant l'impôt sur le revenu ou l'impôt sur les sociétés.
Et là vous pensiez avoir tout compris au financement de la protection sociale... Mais en réalité, cela donne ça (ouch!):
Comme indiqué dans le tableau précédent, 30,4% des recettes des administrations sociales proviennent d'impôts, ce qui représentent environ 150 milliards d'euros. Et comme par magie, si vous faites la somme de l'ensemble des flux financiers de l'Etat vers les différentes branches de la sécurité sociale (famille, maladie, vieillesse), indiqués sur le graphique ci-dessus, vous allez retrouver ce montant de 150 mds. Et vous allez aussi "comme de par hasard" retrouver le montant des recettes de la CSG en faisant la somme de la CSG maladie (54 mds), CSG famille (9,68mds), CSG vieillesse FSV (10,1 mds), CSG CADES (pour amortir la dette sociale, 5,7 mds) et CSG CNSA (solidarité pour l'autonomie, 1,2 mds)
Conclusion: Une partie des dépenses de l'administration de sécurité sociale est incompressible; impossible en effet de diminuer les allocations chômages ou le niveau des retraites... Mais une part non-négligeable, en ce qui concerne les dépenses de santé par exemple (voir "Les dépenses de santé en France et en Allemagne", pourrait être économisée chaque année. Plutôt que de débattre sur des nouvelles tranches d'imposition qui auront un effet quasi-nul sur les finances publiques (au maximum quelques centaines de millions d'euros, en positif ou négatif selon l'exode fiscal), pourquoi ne pas s'attaquer au vrai problème de la France: la dépense publique ? Pour "sauver" la France, il faudrait réduire le déficit de 100 milliards d'euros par an dans les années à venir. En prenant en compte un retour de la croissance, même faible, il faudrait alors diminuer les dépenses d'environ 5% en 5 ans. Réfléchissez bien à 100 euros dépensés par les administrations publiques, et posez vous la question "est-ce possible de diminuer d'un euro par an ces dépenses pendant 5 ans?". Si votre réponse est oui, vous venez de résoudre la crise de la dette en 10 secondes! Bravo ;)