Vous ne comprenez rien à tous ces fonds de stabilité européens? Entre le FESF, le MESF et le MES, il est vrai que c'est un peu compliqué pour un non-spécialiste. Le Captain' va donc consacrer ses trois prochains articles à la description des différents fonds de stabilité. Aujourd'hui, première partie: le Fonds Européen de Stabilité Financière.
Le Fonds Européen de Stabilité Financière (FESF) a été créé en mai 2010 et dispose d'une capacité d'intervention de 440 milliards (1000 milliards via effet levier). Le FESF est garantie par les 17 membres de la zone euro pour un montant total de 780 milliards d'euros, en fonction de la part de chaque pays au capital de la Banque Centrale Européenne. Par exemple, la France contribue à hauteur de 20,3% (en accord avec sa pondération au capital de la BCE), soit un engagement de garanties de 158,5 mds d'euros. Ces montants correspondent à des garanties (sorte de caution), et ne sont pas effectivement prêtés par les différents Ãtats au FESF.
Pour aider les pays en difficultés de la zone euro, le FESF emprunte sur les marchés financiers à des taux bas grâce aux garanties apportés par les Ãtats membres. A sa création, le FESF bénéficiait de la meilleure notation, AAA. Mais suite aux multiples dégradations des Etats membres qui apportaient les garanties au fonds, dont la dégradation de la France, le FESF a été dégradé d'un cran par Standard & Poor's en janvier 2012, et est maintenant noté AA+ (et toujours AAA pour Moody's et Fitch).
Le FESF re-prête ensuite aux pays en difficultés l'argent précedement emprunté sur les marchés, à un taux légèrement supérieur (mais à un taux inférieur à ce que le pays en difficultés aurait payé directement sur les marchés). Depuis sa création, le FESF est intervenu dans 3 pays: en Irlande (pour un montant total de prêt de 17,7 mds d'euros), au Portugal (26 mds) et en Grèce deux fois pour un montant total de ... 179,6 mds (source European Financial Stability Facility).
Mais qui achète les obligations émises par le FESF? Ce sont principalement des banques et des fonds de pensions. Par exemple, le 5 janvier 2012, le FESF a émis des obligations de maturité 3 ans afin de lever 3 millions d'euros, pour ensuite prêter cette somme à l'Irlande et au Portugal dans le cadre des plans d'aides mis en place. Le schéma ci-dessous montre la répartition géographique et le type d'investisseurs ayant acheté des obligations émises par le FESF à cette date là .
Le FESF devrait de plus intervenir pour recapitaliser les banques espagnoles, à hauteur de 100 milliards d'euros! Ce qui porterait l'ensemble des aides accordées par le FESF à 323 mds d'euros. Attention: les aides accordées aux pays en difficultés sont des prêts, ce qui veut dire que si les prêts sont effectivement remboursés, alors le FESF réalisera un bénéfice égal à la différence entre le taux auquel le fonds emprunte sur les marchés et le taux auquel il prête ensuite aux Ãtats en difficulté. Par contre, en cas de non-remboursement d'un pays, alors les pertes réalisées par le FESF seront à la charge des Ãtats membres ayant apportés les garanties (au prorata de la participation au capital de la BCE).
Contrairement au Mécanisme Européen de Stabilité Financière (MESF), dont nous verrons le fonctionnement demain, le FESF fournit une assistance uniquement au pays de la zone euro (contre toute l'Union Européenne pour le MESF). Mais comme le MESF, le FESF est un fonds temporaire, et sera remplacé le mois prochain par le MES, le Mécanisme Européen de Stabilité.
Conclusion: Le FESF emprunte sur les marchés, en bénéficiant de taux bas grâce aux garanties apportés par l'ensemble des pays (et en grande partie car l'Allemagne apporte 27% des garanties) pour ensuite prêter aux pays en difficultés. Outil indispensable de la stabilité de la zone euro, le FESF (comme d'ailleurs son successeur le MES) n'est cependant pas en mesure de faire face à une contagion de la crise à l'Espagne. Le premier plan d'aide au secteur bancaire espagnol de 100 mds, accordés la semaine dernière, pourrait selon certains analystes être trop faible; Olivier Delamarche jugeant par exemple que l'Espagne pourrait avoir besoin de 400 mds. Ajouter ce montant aux prêts déjà accordés au Portugal, à la Grèce et à l'Irlande, et vous casser déjà la barre des 500 mds de fonds du futur Mécanisme Européen de Stabilité.