Il y a une semaine, le 4 juillet 2013, Sir Mervyn King a quitté son poste de gouverneur de la Banque Centrale d'Angleterre (BoE = Bank of England), après 10 ans de bons et loyaux services. Dans une interview accordée au Financial Times il y a quelques semaines, l'ex-gouverneur de la BoE a synthétisé en quelques lignes les 4 solutions pour sortir la zone euro de la crise (source : "Lunch with the FT: Sir Mervyn King"). Simple, clair et efficace.
Les 4 solutions de l'ex-gouverneur de la Banque d'Angleterre pour sauver la zone euro
La première solution serait de continuer avec le chômage de masse dans les pays du Sud, pour voir une diminution des salaires afin que ces pays puissent regagner en compétitivité ("One is to continue with mass unemployment in the south, in order to depress wages and prices until theyâ€ve become competitive again."). En effet, la méthode la plus classique lorsqu'un pays est en crise et qu'il souhaite regagner en compétitivité est de dévaluer sa monnaie, pour faire diminuer les salaires et les prix (en monnaie étrangère) afin de booster les exportations. C'est ce que l'on appelle une dévaluation externe.. Mais dans le cas de la zone euro, étant donné qu'il est par définition impossible pour un pays de la zone de dévaluer sa monnaie seul, la dévaluation doit être interne via une diminution directe des salaires, puis des prix. Bien que la dévaluation externe n'ait pas que des avantages, en créant une forte hausse du prix des importations et une inflation importée (principalement via hausse du prix des matières premières pour les pays européens), c'est une méthode souvent plus rapide et moins douloureuse que la dévaluation interne.
La seconde solution, afin de régler ce problème d'écart de compétitivité entre les pays de la zone, serait que les Allemands acceptent une hausse de l'inflation "â€Well, we have to get rid of this imbalance in competitiveness, so we need inflation in Germany.†That seems unattractive, certainly to the Germans". Bien évidemment, cette solution semble très peu probable étant donné la hantise de l'inflation en Allemagne depuis l'hyperinflation des années 1920 ("L'hyper-inflation allemande de 1923"). Ces deux premiers points se basent donc sur le fait que dans une zone monétaire, avec donc par définition une seule Banque Centrale et une seule politique monétaire, il faut, sauf s'il existe des transferts, que les pays de la zone soient homogènes en termes de compétitivité / croissance / inflation.
Vous aurez donc peut-être deviné la troisième solution : abandonner cette idée de restauration de compétitivité dans les pays du Sud, en optant à la place pour des transferts et des aides des pays du Nord vers les pays du Sud (sorte de fédéralisation). Cette idée se rapproche du principe de la zone monétaire optimale de Mundell (lire "La zone euro doit devenir "optimale" pour survivre !"), qui explique que lorsqu'il existe un choc asymétrique dans une zone monétaire (choc touchant seulement un pays ou un petit nombre de pays), il est nécessaire qu'il existe des mécanismes d'ajustements afin de rétablir l'équilibre entre les pays. Ces mécanismes peuvent prendre deux formes principales : (1) des transferts budgétaires pour ajuster les déséquilibres (= donner/prêter de l'argent à la Grèce et autres comme on peut le faire actuellement vers les DOM-TOM, pour une durée indéfinie) ou (2) une parfaite mobilité des facteurs de production (= que les chômeurs grecs et espagnols partent en Allemagne trouver du boulot) pour rééquilibrer l'offre et la demande dans chaque pays.
Mervyn King précise concernant le 1er point qu'il est nécessaire que les pays du Sud acceptent les conditions imposées par les pays du Nord, afin de limiter la taille des transferts, d'éviter les comportements de passagers clandestins et de rééquilibrer la zone à moyen / long terme.
"[...] to give up on this question of restoring competitiveness quickly and accept that this is an indefinite transfer union. That requires two things: one is for people in the north to give money to people in the south; the other is for people in the south to accept the conditions imposed on them, which will limit the size of the transfer".
Dernière solution : changer la composition de la zone euro, en détruisant la zone euro actuelle ou bien en créant des zones réduites plus homogènes (zone-euro réduite avec l'Allemagne, l'Autriche, les Pays-Bas, la Finlande, la Belgique, le Luxembourg et la France par exemple) "The fourth is to change the membership. Now, I donâ€t know what the right answer is, and it will depend on their political objectives, but economics tells you that you have to have one or some combination of these". C'est une question dont les réponses sont davantage politiques et idéologiques qu'économiques, bien que le problème pourrait très bien être abordé par chaque pays selon une approche "avantages et inconvénient d'une sortie ou d'un maintien dans la zone (lire par exemple "Avantages et inconvénients d'une sortie ou d'un maintien de la Grèce dans l'euro" par Pascal de Lima)
Conclusion : Alors, quelle solution vous semble la meilleure ? Le Captain' vote pour la troisième solution, avec un zeste de la seconde.
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