Afin de prévoir les évolutions à long terme du prix du pétrole, il est intéressant de regarder les facteurs pouvant influencer l'offre (à la hausse comme à la baisse) et la demande en pétrole. La théorie du pic pétrolier ("peak oil" in english), s'intéresse à la composante "offre". Si l'offre en pétrole diminue alors que la demande est constante, alors le prix augmentera (base de la théorie économique "offre-demande"). Le graphique ci-dessous montre bien cette relation: si l'offre diminue (passant de S à S1), alors le prix augmente de Pe à Pe1 (pour une demande constante).
Mais alors, comment va évoluer l'offre en pétrole dans les années à venir? Le "peak oil" représente le sommet de la courbe de production de pétrole, c'est à dire le moment où la production de pétrole aura atteint son plus haut niveau et commencera à diminuer (via l'épuisement des réserves de pétroles exploitables). Le premier modèle de prévision du "peak oil" a été développé en 1956 par un géophysicien américain, Marion King Hubert, afin de prévoir à partir de quelle date la production de pétrole commencera à décliner aux USA. Cette courbe, qui prend en compte la production actuelle, les réserves identifiées et les futures découvertes de pétrole, ressemble à ça (la frontière entre "cumulative production" et "proven reserves" est située à cet endroit car l'étude date de 1956).
Le "peak oil" aurait donc dû avoir lieu autour des années 2000. Mais qu'en est-il en réalité? Selon l'Agence Internationale de l'Energie, le fameux "peak oil" est peut-être déjà derrière nous, mais la courbe de production n'aurait finalement pas la forme de celle prévue par M. King Hubert. En effet, plutôt qu'une forte diminution post-pic pétrolier, la production de pétrole pourrait avoir la forme d'un plateau, avec une production de pétrole conventionnel (crude oil) proche de 68 millions de barils par jours entre 2020 et 2035. Pourquoi cette différence? Principalement via le développement du pétrole non-conventionnel (sables bitumeux, schistes bitumeux, liquéfaction du charbon...) ainsi que la hausse de production de gaz naturel liquide. De plus, la hausse du prix du pétrole rend exploitable certaines réserves dont l'extraction coûtait trop cher auparavant et les processus d'extraction deviennent de plus en plus performant (ce qui permet d'aller chercher du pétrole dans des endroits auparavant inaccessible)...
Pour l'Agence Internationale de l'Energie, le pic pétrolier serait plutôt un "plateau pétrolier", ayant cette forme:
Le Cambridge Energy Research Association partage à peu près la vision de l'Agence Internationale de l'Energie, en étant davantage optimiste sur la date à laquelle le "plateau" sera atteint, avec une hypothèse de développement du pétrole non-conventionnel très importante (plateau autour de 120 millions de barils par jour).
Bref, même si les experts ne sont pas tous d'accord sur le moment où le pic pétrolier arrivera, ni sur la forme de la courbe de production ensuite (décroissante ou stable), une chose est sure: la production de pétrole ne peut augmenter indéfiniment. Dans l'hypothèse d'une production stable dans le futur (disons jusqu'en 2050), la question principale est donc de savoir comment la demande va évoluer. Et là , c'est un peu l'inconnu, même si les pressions à la hausse semblent supérieures aux pressions à la baisse. La demande devrait augmenter entre autre via le développement de la Chine et de l'Inde... et potentiellement baisser en cas de recours aux énergies alternatives ou bien d'innovations permettant de réduire la consommation.
Conclusion: L'évolution à long terme du prix du pétrole dépend de tellement d'hypothèses qu'il est impossible à prévoir (innovations, découvertes de réserves, nouvelles énergies, conjonctures économiques, réformes pour éviter le réchauffement climatique...), même si les probabilités d'une hausse du prix du barril me semblent bien plus fortes que celles d'une baisse (source du graphique: RNCAN).